L’article L145-14 du Code de commerce est conforme à la Constitution !

Écrit le
1 avril 2021

Cons. const., déc., 5 mars 2021, n° 2020-887 QPC

Le Conseil constitutionnel déclare conformes à la Constitution les dispositions de l’article L. 145-14 du code de commerce qui imposent au bailleur qui refuse le renouvellement d’un bail commercial le paiement d’une indemnité d’éviction au locataire, égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement et sans plafonnement.

  • Une indemnité disproportionnée ?

 

Comme nous l’avions évoqué dans l’ACTU byNMCG du mois dernier, l’exploitant d’un hôtel parisien, qui s’était vu refuser le renouvellement de son bail et offrir le paiement d’une indemnité d’éviction, a assigné le bailleur en paiement de l’indemnité d’éviction.

Le bailleur avait soulevé devant le tribunal judiciaire une question prioritaire sur la conformité à la Constitution de l’article L. 145-14 du code de commerce.

Il reprochait à ce texte de le contraindre à payer une indemnité d’éviction comprenant la valeur marchande du fonds de commerce et ce sans que son montant soit plafonné.

Aux termes d’un arrêt du 10 décembre 2020 (Cass. 3e civ., 10 déc. 2020, n°20-40.059, n° 970 FS-P + I), la Haute Juridiction avait jugé la question « sérieuse ».

La Cour notait en particulier que le montant de l’indemnité d’éviction était susceptible de dépasser la valeur vénale des murs et de ce fait serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété du bailleur tel que garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.

  • Le Conseil constitutionnel valide les modalités de calcul de l’indemnité d’éviction

 

Par sa décision, rendue le 5 mars 2021, le Conseil constitutionnel reconnaît que les dispositions de l’article L 145-14 du Code de commerce restreignent le droit du bailleur de disposer librement de son bien à l’expiration du bail et portent donc atteinte au droit de propriété. Toutefois, il estime que :

  • D’une part, en prévoyant l’indemnisation du locataire en cas de non renouvellement de son bail, le législateur a souhaité permettre la poursuite de son activité et éviter que la viabilité des entreprises commerciales et artisanales soit compromise.

Le Conseil constitutionnel a donc considéré que cette atteinte poursuivait un objectif d’intérêt général.

  • D’autre part, dans la mesure où l’indemnité d’éviction n’est due que lorsque le locataire a exploité son fonds de commerce dans les conditions conformes au bail commercial au cours des trois années ayant précédé son expiration, et que le bailleur conserve en tout état de cause la possibilité de vendre son bien ou d’en percevoir un loyer.

Le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions contestées ne portaient pas au droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi.

Les mots « comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce déterminée selon les usages de la profession » figurant au second alinéa de l’article L. 145-14 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000, sont conformes à la Constitution.

Est-il possible d’échapper à cette obligation par le jeu des stipulations contractuelles ? 

La réponse est non.

Une fixation anticipée de l’indemnité d’éviction dans le bail pourrait tomber sous le coup de l’article L. 145-15 du code de commerce qui répute non écrites les stipulations ayant pour effet de faire échec au « droit au renouvellement » notamment régi par l’article L. 145-14.

Par conséquent, il ne peut être que conseillé à un bailleur d’évaluer préalablement l’indemnité dont il pourrait avoir à s’acquitter avant d’adresser un congé sans renouvellement à son locataire commercial.

Le cabinet NMCG et toutes ses équipes se tiennent à votre entière disposition pour toutes questions relatives à vos baux commerciaux.

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