Cession des droits, par l’employeur, relatifs à une invention de mission

Cass. Com., 5 janvier 2022, n°19-22.030

Les inventions de mission, faites par le salarié dans l’exécution soit d’un contrat de travail comportant une mission inventive, soit d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent ab initio à l’employeur en application de l’article L. 611-7, 1°, du code de la propriété intellectuelle.

Mais un tiers au contrat de travail qui a déposé une demande de brevet peut-il opposer la qualification d’invention de mission à l’ancien salarié de la société dont il a acquis les actifs incorporels ?

1. Les faits

Dans cette espèce, un salarié, recruté en qualité de responsable de projets, avait développé pour le compte de son entreprise une invention pour laquelle une première demande de brevet avait été déposée par la société.

Une société, tiers à la société-employeur liquidée, a acquis les éléments incorporels de l’actif de cette dernière dont les droits sur le brevet français déposé.

Elle a par la suite déposé un brevet européen reprenant les éléments du brevet français qu’elle avait acquis.

Le salarié, prétendant que ce dépôt reprenait les caractéristiques des revendications issues de travaux effectués avec ses propres moyens et contenues dans une enveloppe Soleau qu’il avait déposée, agit contre la société-cessionnaire pour obtenir le transfert à son profit du brevet européen.

2. La première analyse de la Cour de cassation et de la Cour d’appel de renvoi

La première cour d’appel avait rejeté les demandes du salarié en considérant l’invention couverte par le brevet européen d’invention de mission et en jugeant que, du fait de l’acquisition des éléments incorporels de la société liquidée, la société-cessionnaire venait aux droits de l’ancien employeur quand elle a déposé le brevet européen.

Par la suite, et par un premier arrêt du 31 janvier 2018 (n° 16-13.262) la Cour de cassation avait cassé cette décision en affirmant que l’acquisition des éléments incorporels de l’actif d’une société, comprenant un brevet et le résultat de travaux effectués dans la continuité de ce brevet par un salarié investi d’une mission inventive qu’elle avait employé, ne conférait pas au cessionnaire la qualité d’ayant droit de l’employeur.

Par conséquent, ce cessionnaire, qui a déposé un brevet à partir de ces éléments, n’est pas fondé à opposer au salarié que l’invention, dont celui-ci est l’auteur et revendique la propriété, est une invention de mission, lui appartenant.

La cour d’appel de renvoi a, de nouveau, débouté le salarié inventeur de ses demandes en jugeant que, peu important qu’elle ait ou non la qualité d’ayant droit de l’employeur, le cessionnaire justifiait d’une chaîne régulière de droits lui conférant la propriété du brevet européen.

3. La seconde analyse de la Cour de cassation

Le salarié ayant formé un nouveau pourvoi, la Cour de cassation s’est retrouvée saisie une seconde fois de la problématique.

La Cour de cassation indique qu’aucune disposition n’empêche l’employeur de céder ce droit sur l’invention à un tiers.

Ainsi, si le cessionnaire des actifs incorporels, ne peut se voir attribuer le droit au titre par application de l’article L. 611-7, 1°, il peut l’acquérir en vertu d’une cession de droits conclue avec son auteur.

Il est alors libre de déposer un brevet protégeant cette invention, sans que le salarié ne puisse en revendiquer le transfert à son profit.

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